Le mariage de Musique et Poésie - Accord et discord (1552-1600)
Mémoire de maîtrise

Longtemps, la poésie fut liée au chant et à la danse : le rythme du vers épouse alors le mouvement du corps, l'élan d'un geste et d'une voix. Longtemps aussi la musique et la poésie furent deux arts jumeaux, conçus l'un par rapport à l'autre, l'un pour l'autre : dans le chant, le poème devient une parole partagée, indéfiniment reprise et variée.

A la Renaissance, les humanistes, cherchant à retrouver les pouvoirs de la lyrique antique, ont rêvé le "mariage de Musique et Poésie". La collaboration unique des musiciens et des poètes a alors permis la floraison de "chansons nouvelles" fort appréciées et chantées tant à la cour qu'à la ville. A l'aube du Grand Siècle, pourtant, ce dialogue si fécond a cessé : la musique et la poésie prennent peu à peu des chemins séparés...

En prenant l'oeuvre de Ronsard comme "fil d'Ariane", nous tenterons alors d'étudier les raisons de ce "divorce" qui donne à ces deux arts, autrefois étroitement unis, un autre rythme, un autre sens.


Mémoire de DEA
Mémoire de DEA

On a souvent décrit la modernité comme une aventure et à lire le témoignage des artistes eux-mêmes on songe, de fait, que la création a bien été au XXe siècle une incessante exploration des formes et des langages ; le sens même des œuvres, dans cet espace redéfini, ne semble plus aller de soi comme si c’était la place même de l’art dans le monde qu’il fallait repenser et fonder à nouveau.

Ainsi pour le poète, la progressive dissolution des formes fixes et des mètres – cette « vieillesse d’Alexandre » dont parlait Jacques Roubaud – transforme l’écriture en un voyage dans les mots, les rythmes, les images, en une perpétuelle réinvention de ce qu’on nomme poésie. Mais le discrédit porté sur le lyrisme romantique impose aussi au poète de repenser en profondeur la valeur et le sens de son œuvre : qu’est-ce que la poésie et que dit-on, que fait-on lorsqu’on écrit un « poème » ?

On comprend alors que les artistes, jetés sur cette route mal tracée, aient cherché à nouer entre eux un dialogue, à transformer parfois la création en un jeu « à quatre mains » : ainsi Picasso illustrant tel recueil d’Eluard ou Cendrars collaborant avec Abel Gance.


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René Char « La poésie au miroir de la musique »

Dans le cadre de cette journée consacrée à René Char, j’aimerais aborder un versant peu connu de l’amour du poète pour les arts. Si la peinture fut en effet pour lui une « alliée substantielle », Char se tourna aussi, un temps, vers la musique : ce n’était certes pas un mélomane, comme ses contemporains Henri Michaux ou Pierre Jean Jouve, mais son oreille de poète, sensible aux sons harmonieux, aux lignes et aux résonances, se laissait parfois attirer par une musique, un chant, un monde sonore. Mais Char, animé du désir d’unir poésie et musique, « ces deux grands, intarissables et différents mystères », est aussi l’un des rares poètes du siècle à avoir « sauté le pas », imaginant avec un compositeur une œuvre aux frontières de la parole et du chant, du langage et du son, de la poésie et du théâtre. Cette œuvre, c’est la cantate radiophonique du Soleil des Eaux mis en musique par Pierre Boulez.

La Musique pour piano de Debussy : Imaginaire et Forme.

"Qui connaîtra le secret de la composition musicale ? Le bruit de la mer, la courbe d'un horizon, le vent dans les feuilles déposent en nous de multiples impressions. Et tout d'un coup, sans qu'on y consente le moins du monde, l'un de ces souvenirs se répand hors de nous et s'exprime en langage musical. Il porte en lui-même son Harmonie. Quelque effort que l'on fasse, on n'en pourra trouver de plus juste, ni de plus musical."

Le boeuf écorché

Deux versions du boeuf écorché :
- 1ère version (Glasgow) comporte toute une mise en scène. (intérieur d’un abattoir, femme lave la sang sur le plancher, tête coupée de l’animal posée sur le sol, au premier plan, à droite).
- Voir aussi dessin de 1625 : « Deux bouchers au travail sur une carcasse.

Comment le dire ? (revue Poésie n°120)

Le 21 octobre 1998, à Paris, dans le cadre du festival d’Automne, est créé ...pas à pas – nulle part..., une œuvre du compositeur hongrois György Kurtág, sur des poèmes de Samuel Beckett et des maximes de Sébastien Chamfort, pour baryton solo, trio à cordes et percussions . C’est l’opus 36 du compositeur, qu’il a mis plus de cinq ans à composer après un long travail de maturation.

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Pierre Boulez, 12/06/2006

« Je souhaiterais organiser l’entretien autour d’un thème central : « La musique et les lettres » (titre d’une célèbre conférence de Mallarmé à Oxford), en entendant « lettres » en son sens le plus large. Nous reviendrons sur votre long compagnonnage avec les écrivains – poètes, romanciers ou philosophes –, sur cette familiarité avec le monde des livres, qui, depuis vos premières oeuvres jusqu’à aujourd’hui, vous ont conduit tour à tour à prolonger la pensée des écrivains que vous aimiez - leur conception de l’œuvre - dans la création musicale… »

Gilbert Amy, 13/12/2006

« Lorsqu’on lit le texte, on est d’emblée frappé aussi par l’aspect phonétique : c’est un texte très « encombré » de consonnes, très dense. D’un autre côté, il y a cette modulation de sons vocaliques. Dans votre œuvre d’ailleurs, la dernière pièce ne fait entendre que les voyelles. La dimension phonétique du texte vous a aussi intéressé? »

Dominique Fourcade, 27/09/2007

« Je voudrais revenir avec vous sur ce que vous m'avez dit la première fois que nous nous sommes parlés. La poésie est pour vous une musique – comme vous le dites souvent : "J'écris des sons", "Ecrire poétiquement, c'est écrire avec des sons…»

Stefano Gervasoni, 29/09/2007

« …j’étais un italien à Paris, et comme je pense que le contact avec une nation, avec sa culture doit passer par la langue, je me suis intéressé à la poésie française et puis j’ai découvert qu’il y avait des non-français qui étaient dans ma situation d’émigré, à Paris ou en France. Je me suis dit : « Je dois rendre un hommage à ce pays. »
Et si Beckett, Ungaretti écrivaient en français c’est peut-être parce qu’ils ont eux-aussi senti la même urgence, le même besoin. »